Ce Conseil Ministériel 2025 ne se présente pas sous les meilleurs auspices pour ArianeGroup. La CFE-CGC compte sur la Direction pour représenter au mieux ArianeGroup et ses intérêts. Nous comptons aussi sur nos ministères de tutelles et les politiques français, il leur revient d’affirmer la position de la France dans le spatial Européen, de le financer et d’accélérer les prises de décisions.
Autant d’incertitudes dont les salariés se seraient bien passées. Ils peuvent en revanche avoir une certitude : l’engagement de la CFE-CGC pour les salariés ! Nous réaffirmons notre attachement à la société ainsi que notre ambition de l’accompagner ainsi que l’ensemble de ses salariés car, répétons-le, nos emplois d’aujourd’hui et ceux de demain dépendent de la réussite de l’entreprise.
LE CONSEIL MINISTÉRIEL C'EST QUOI ?Organisé tous les trois ans, le Conseil Ministériel de l'ESA réunit les ministres responsables des affaires spatiales des États membres de l'Agence afin de déterminer ses grandes orientations stratégiques ainsi que son budget triennal. Chaque État membre de l’ESA :
- Sélectionne les programmes optionnels auxquels il souhaite contribuer/participer,
- Décide du montant de sa contribution à chacun de ces programmes facultatifs.
Le prochain conseil ministériel de l'ESA se tiendra à Brême fin novembre 2025.
Notez que tous les programmes sur lesquels travaillent ArianeGroup sont optionnels. Les futurs programmes de lanceurs, l’ELC et même Ariane 6 !
LE CONTEXTEDes changements notables vont vraisemblablement impacter ce Conseil Ministériel 2025 :
- La plus forte incitation à la concurrence intra-européenne et un soutien aux projets nationaux plutôt qu’européens, décidés au sommet spatial de Séville de 2023 et dont la résultante est notamment l’ELC (European Launcher Challenge)
- L’environnement géopolitique mondial, notamment nos rapports avec les États-Unis, qui change la donne sur différents projets comme l’exploration avec la fin potentielle de SLS/Orion, Lunar Gateway et Mars Sample Return.
Au niveau budgétaire, la Direction Générale de l’ESA souhaite obtenir une augmentation des souscriptions des Etats.
àElle vise un budget de l’ESA à 23 Mds€ (vs 17Mds€ après le CM22)
Il semble que les États membres prévoient un CM25 avec des ambitions renouvelées et acceptent une augmentation de leur contribution au budget.
Ce serait le cas pour l’Allemagne qui devrait renforcer son rang de premier contributeur au budget de l’Agence spatiale européenne, mais aussi de l’Italie et de l’Espagne.
Malheureusement, la France ne devrait pas augmenter sa participation au budget de l’ESA.
LES ENJEUX POUR ArianeGroupLa Direction a présenté aux élus les grands enjeux pour notre entreprise tant pour le transport spatial que pour l’exploration.
Ils revêtent tous une grande importance.
Bien que nous ne puissions pas rentrer dans le détail, car s’agissant de la stratégie de notre entreprise, si la direction se montre assez confiante quant au financement de plusieurs sujets majeurs, pour d’autres, la situation est plus incertaine dans le contexte de la répartition des participations au budget de l’ESA et cela s’annonce plus compliqué.
Les difficultés budgétaires de la France précédemment évoquées devraient nous impacter, mais pas que…
Rappelons qu’en 2022, la part du budget de l’ESA consacré au transport spatial était de 17%. Il existe donc de nombreux autres sujets qui seront abordés lors de ce conseil ministériel et qui pourraient prendre le dessus sur le transport, dans contexte où c’est le secteur du spatial Européen dans son ensemble qui est en mutation pas « seulement » celui des lanceurs. Le domaine des satellites, en est un exemple.
Si Space X a fortement rebattu les cartes dans le transport spatial, le modèle d’Elon MUSK avec une solution qui intègre 100% de la chaine de valeur (lanceurs + satellites + offre Starlink) a accru le pression sur les fabricants de satellites Européens.
Le projet BROMO, porté par les groupes aérospatiaux européens Leonardo, Airbus et Thales, qui ont conclu ce 20 octobre un accord-cadre sur un projet de fusion de leurs activités satellite, en est la preuve et il fera partie des sujets de discussion en coulisses du Conseil ministériel, car il apporte lui aussi son lot de négociations intra européennes.
L'EUROPE FACE À SES PROPRES FREINSPour la CFE-CGC, au-delà de la dimension budgétaire qui est extrêmement importante pour ArianeGroup et l’industrie du spatial européen, il y un frein supplémentaire : le temps de la prise de décision.
En Europe il est toujours trop long et il serait plus que souhaitable d’accélérer.
Quelques exemples :
- L’idée d’IRIS² a été initiée en 2022 par Thierry BRETON, son règlement a été validé au niveau européen en mars 2023. C’est fin 2024 qu’un contrat de concession a été signé. Il aura donc fallu 2 ans d’âpres discussions entre les Etats membres et particulièrement avec l’Allemagne, qui faisait part de réticences, pour arriver à un consensus.
In fine IRIS² se fera, ArianeGroup devrait pouvoir effectuer des lancements de la constellation. Elle devrait être opérationnelle en 2030, bien après d’autres constellations (Starlink, Kuiper, Guowang) mais par chance ne devrait pas pâtir de la « compétition des bandes de fréquence » qui se joue entre les constellations. Mais l’Europe peut-elle toujours compter sur la chance ?
- La Commission européenne a présenté le projet de « EU Space Act » le 25 juin 2025. Ce règlement a pour but d’uniformiser, moderniser et renforcer le cadre réglementaire du spatial européen, l’idée étant de créer un véritable marché unique des activités spatiales.
Mais encore une fois tout est long : son entrée en vigueur est annoncée pour janvier 2030 !
Par rapport à la concurrence qui se joue dans le spatial, notamment avec les USA, c’est une éternité. Ce décalage de rythme entre l’Europe et les États-Unis est majeur, nos concurrents se développent à pleine vitesse et l’Europe fixe des horizons à 5 ans !
Dans le même temps Donal TRUMP a promulgué un décret, mi-août 2025, qui simplifie immédiatement les autorisations de lancement en réduisant les examens et les formalités administratives.
Pendant que nous « bataillons » en Europe, les autres avancent et fragilisent TOUTE l’industrie spatiale Européenne. Il est impératif que la prise de décisions soit accélérée pour soutenir notre filière.
- Terminons en revenant sur le projet BROMO évoqué plus tôt. Cela fait de longs mois que le sujet est discuté, même s’il est acté, ce n’est qu’une première étape qui pourrait encore durer jusqu’à 2 ans.
Les précédentes tentatives de fusion des activités satellitaires au cours des dernières années ont échoué en raison de préoccupations de concurrence et de rivalités nationales. Par ailleurs, toute ressemblance avec une situation connue ne serait que pur hasard (ou pas), les négociations, qui impliquent la répartition entre la France et l'Italie de technologies et d'emplois stratégiquement sensibles, auraient été rudes et n'ont pas été facilitées par la crise politique française.
Enfin, le projet Bromo devra convaincre les régulateurs que la consolidation industrielle ne nuit pas à la concurrence intra-européenne et respecte les lois antitrust.
Vous l’aurez compris, au-delà du transport spatial et des enjeux pour ArianeGroup, c’est bien pour l’ensemble de la filière du spatial Européen que le prochain CM25 sera important.
Le France n’y arrive pas dans la posture la plus favorable et il faudra suivre de très près les conclusions de ce Conseil Ministériel.
CONCLUSIONS CFE-CGC
Nous savons que beaucoup de sujets sont politiques, voire géopolitiques et qu’à notre échelle, salariés ou syndicats, nous n’avons que peu ou pas de prise directe sur les évènements.
Malheureusement, la situation actuelle de la France est un élément qui ne nous rassure pas.
Si les agences et spécialistes du spatial Français porteront les sujets importants, la situation financière française couplée à un équilibre gouvernemental précaire ne sont pas des atouts pour représenter sereinement les intérêts de la France et de ses industriels.
Tout ceci dans un contexte ou d’autres nations Européennes arrivent à ce CM25 avec de fortes ambitions et des allocations budgétaires en adéquation avec celles-ci.
Enfin, comment ne pas évoquer les questions légitimes que pose l’annonce du départ de notre CEO en mars 2026 ?
Oui, nous faisons confiance à notre CEO, et à toutes les équipes ArianeGroup engagées, pour l’énergie et la détermination qui seront déployées afin de défendre les intérêts de l’entreprise lors de ce CM25,
Oui, la CFE-CGC pense que notre CEO a fixé un cap et a apporté sa pierre à l’édifice de l’entreprise : concrétisation des premiers vols A6, statut social harmonisé, adaptation de l’entreprise pour accélérer l’industrialisation et la montée en cadence,
Oui, il est fort à parier que le poste qui lui a été proposé aurait été refusé par peu de personnes de ce niveau.
Mais voilà, son mandat n’aura duré que 3 ans et la CFE-CGC ne peut que regretter un départ en plein ramp-up et juste après un CM25 aussi tendu. Aussi les questions sur son remplacement vont bon train : quid du futur profil du CEO ? A quel rythme se fera la transition ? Quid du cap fixé ? Faut-il s’attendre à de nouveaux changements ? …
Autant d’incertitudes qui se rajoutent au CM25 et dont les salariés se seraient bien passées.
Ils peuvent en revanche avoir une certitude : l’engagement de la CFE-CGC pour les salariés ! Nous réaffirmons notre attachement à la société ainsi que notre ambition de l’accompagner ainsi que l’ensemble de ses salariés car, répétons-le, nos emplois d’aujourd’hui et ceux de demain dépendent de la réussite de l’entreprise.